DeepSeek et Trump 2.0 : L’avenir de l’industrie américaine
Alfred Lam - Mar 26, 2025
1. Comment la présidence de Donald Trump transforme-t-elle les échanges commerciaux et l’ordre mondial?
Nous nous attendons à ce qu’il y ait un impact globalement positif sur les marchés américains avec Donald Trump au pouvoir. Par ailleurs, son cabinet compte 11 milliardaires, tandis que celui de Joe Biden affichait une valeur nette combinée de 100 millions $. Un gouvernement composé de nombreux hommes d’affaires prospères laisse présager une orientation plus favorable au secteur privé. En fin de compte, le Trump 2.0 mise sur le secteur privé pour stimuler la croissance des États-Unis, tout en cherchant à réduire les dépenses publiques afin de diminuer le déficit. Ces deux forces pourraient s’opposer, mais si elles aboutissent, elles entraîneront une baisse des taux d’intérêt à long terme et stimuleront davantage la croissance du secteur privé.
Les signaux à surveiller seraient une accélération de la relocalisation et un allègement réglementaire, qui offriraient le plus fort levier de relance économique. Nous avons davantage positionné le fonds en faveur des fournisseurs d’infrastructures énergétiques dans notre domaine d’intérêt climatique et renforcé notre exposition à l’infrastructure grâce à des investissements dans CRH et Comfort Systems. Nous examinons également la réaction du reste du monde au président Trump et avons une exposition à des entreprises européennes du secteur de la défense dans notre domaine d’intérêt lié à la sécurité. Les tarifs douaniers et l’incertitude qui les entourent constituent le principal risque à court terme. Nous maintiendrons donc une faible pondération des entreprises de consommation tant que ce risque ne sera pas résolu ou intégré dans les cours.
Si les politiques de M. Trump parviennent à réduire le déficit et les taux d’intérêt à long terme, nous pensons que d’autres pays tenteront d’emboîter le pas, ce qui pourrait favoriser de meilleurs rendements dans des régions affichant des multiples plus bas, comme l’Europe et la Chine.
2. Quelle leçon les investisseurs ont-ils tirée du lancement de DeepSeek en Chine?
La principale leçon que nous avons retenue de DeepSeek est que l’environnement des actions exposées à l’IA est probablement beaucoup plus saturé que nous ne le pensions initialement. Cet espace nécessite donc une correction avant de pouvoir repartir à la hausse.
D’un point de vue fondamental, nous ne sommes pas surpris de voir le coût de l’IA baisser. La seule véritable nouveauté ici est que c’est une entreprise chinoise qui en est à l’origine. À notre avis, cette avancée est en réalité positive pour l’adoption généralisée de l’IA et la croissance globale du secteur. Le marché adressable total (TAM) de l’IA est très vaste (ce n’est pas juste les applications destinées aux consommateurs qui génèrent des hausses de revenus). Par conséquent, une IA moins coûteuse, et désormais l’IA chinoise, signifie que son adoption est plus probable dans de nombreux secteurs d’activité et pays.
Avec la disponibilité de modèles alternatifs, les principaux fournisseurs de centres de données à très grande échelle accélèrent désormais leurs investissements en IA. La crainte initiale était que la baisse du coût de DeepSeek entraîne une réduction des dépenses en immobilisations, mais des sociétés comme Meta et Google ont réagi à cette annonce en augmentant leurs dépenses en immobilisations liées à l’IA, confirmant ainsi le contraire. Les dépenses en immobilisations des quatre principaux fournisseurs de centre de données à très grande échelle devraient désormais atteindre 350 G$ en 2025, contre 250 G$ en 2024, soit une hausse de plus de 40 %. Cela est nettement supérieur aux attentes consensuelles, qui prévoyait 285 G$ avant les résultats. Les dépenses en capital des centres de données chinois augmentent également, Alibaba ayant annoncé qu’elle triplerait ses dépenses pour les porter à 50 G$ au cours des trois prochaines années, afin de tirer parti de ces nouveaux modèles.
En fin de compte, il est important de se rappeler que ce phénomène, où la baisse du coût des technologies accélère leur adoption à grande échelle (le paradoxe de Jevons), n’est pas nouveau. Prenons les cinq dernières décennies de l’industrie des semi-conducteurs, où le coût moyen d’un semi-conducteur a chuté de manière exponentielle, passant de la percée des ordinateurs centraux d’IBM jusqu’à l’iPhone d’Apple; le matériel est devenu moins cher, mais l’adoption de l’informatique dans son ensemble n’a fait que s’accélérer en conséquence. Nous pensons qu’il n’en sera pas autrement cette fois-ci. À mesure que les fournisseurs de centres de données à très grande échelle continuent d’obtenir de meilleurs résultats grâce à des grappes plus vastes de semi-conducteurs et à une infrastructure renforcée, le risque d’un ralentissement significatif est repoussé dans le temps, alors que l’IA devient de plus en plus utile tant pour les entreprises que pour les particuliers.
3. Y a-t-il des changements dans le portefeuille des actions américaines, notamment en lien avec Trump et DeepSeek?
Comme mentionné ci-dessus, nous avons augmenté notre exposition aux sociétés américaines nationales de construction ainsi qu’aux fournisseurs d’équipements de production d’énergie. Les États-Unis manquent d’électricité, et puisque M. Trump a de grandes ambitions pour devenir un chef de file de l’IA, DeepSeek ne fera qu’accélérer ces plans. Nous nous attendons à une augmentation soutenue ou accélérée des investissements dans les infrastructures énergétiques et la capacité des centres de données aux États-Unis, et nous avons cherché à positionner le fonds pour en tirer parti.
Nous n’avons apporté aucun changement significatif à la suite de l’arrivée de DeepSeek.
Ces informations sont fournies à titre général uniquement et ne visent pas à inclure ni à constituer des conseils en matière de produits financiers. Les opinions exprimées par Munro Partners sont à jour au 25 février 2025 et sont susceptibles d’être modifiées.
À propos de l'auteur
Alfred Lam, MBA, CFA
Alfred Lam, Vice-président principal et co-chef des stratégies multi-actifs, s’est joint à Gestion mondiale d'actifs CI (GMA CI) en 2004. Il apporte plus de 23 ans d’expérience dans le domaine en matière de construction de portefeuille, de répartition d'actifs et de gestion des risques, ce qui comprend la présidence du comité de gestion des investissements multi-actifs et l'évaluation d'opportunités d’investissement pour générer une valeur ajoutée et gérer les risques. Alfred possède le titre de CFA et un MBA de la Schulich School of Business de l’Université York. Il est un chef de file reconnu en matière d'investissement multi-actifs au Canada. Au cours de son mandat, son équipe a remporté de nombreux prix d’investissement, y compris le meilleur fonds de fonds Morningstar, et a fait quadrupler ses actifs.